Pilotage de l’azote : le bouquet d’OAD pour décider
Plusieurs outils d’aide à la décision (OAD) offrent aujourd’hui des méthodes de pilotage afin d’assurer la continuité de la nutrition azotée avec un maximum d’efficacité en fonction des besoins de la culture, des stades, des objectifs de rendement et des conditions culturales et météorologiques. Décryptage.
Pour répondre à l’enjeu majeur d’une nutrition azotée efficace des cultures, de nombreux outils d’aide à la décision (OAD) ont été développés pour accompagner les agriculteurs. Ces derniers reposent sur différentes données et intègrent pour certains des technologies avancées comme l’intelligence artificielle, la proxy-détection ou télédétection. Cependant, dans tous les cas, il est important de rappeler que le premier outil est de loin celui du plan prévisionnel de fumure azoté (PPFA) dont le socle de raisonnement est constitué des données de l’exploitation elle-même (historique des données parcellaires de rotation, analyses de sols, analyses de reliquats en sortie d’hiver, potentiels de rendement, minéralisation du sol, apports en fertilisants, couverts végétaux…). Ce plan de fumure repose sur la méthode du bilan prévisionnel qui est d’ailleurs le socle sur lequel sont basés les OAD labellisés Prev’N, un label du Comifer qui garantit le respect de cette méthode.
Plus proche du réel
C’est pour adapter plus finement encore le pilotage de la fertilisation azotée par rapport aux calculs du plan de fumure que certains outils d’aide à la décision proposent d’ajouter des données issues des cultures, comme des pesées de biomasse pour la fertilisation du colza, ou des mesures de sève comme avec la méthode Jubil® par exemple. Ces types d’OAD réclament ainsi des opérations de mesure à réaliser directement par les agricultrices et agriculteurs dans leurs parcelles. Une moyenne est alors faite qui, au travers d’abaques, permet de calculer différents indicateurs tel que le statut nutritionnel de la culture et in fine donner une dose moyenne d’azote efficace à apporter. Dans la majorité des situations, ces OAD se concentrent sur le dernier apport qui sert de variable d’ajustement. Il est fréquent de prendre en compte les paramètres que sont l’objectif actualisé de rendement ou encore la variété (notamment dans les modèles appliqués pour le blé) et le taux de protéine visé (pour le blé ou l’orge principalement). Cependant, les mesures effectuées par des prélèvements in situ ne reflètent qu’imparfaitement l’état d’une parcelle au sein de laquelle l’hétérogénéité peut être forte.
Gommer le biais d’échantillonnage
Plusieurs OAD proposent de s’affranchir de l’échantillonnage ou de compléter l’analyse par des données plus globales de cartographie de télédétection par imagerie satellitaire. Des services tels que Farmstar (association d’Arvalis et Airbus) exploitent ces données satellitaires d’imagerie des parcelles pour évaluer la biomasse et la teneur en chlorophylle des plantes, et d’autres indicateurs clés de leur état nutritionnel. Ces informations sont ensuite traduites en cartes de préconisation, facilitant la modulation des doses d’azote en fonction des besoins spécifiques de chaque zone de la parcelle. La télédétection offre l’avantage de pouvoir mutualiser l’acquisition de données auprès d’un nombre important d’utilisateurs. Cependant, la résolution spatiale des satellites peut limiter la détection des variations fines, et les conditions météorologiques, comme la couverture nuageuse, peuvent affecter et surtout retarder le conseil délivré. Dans ce contexte, plusieurs entreprises ont développé des outils de préconisation par proxy-détection. Il s’agit notamment de l’imagerie par drones équipés de capteurs multispectraux qui assurent l’acquisition de données à très haute résolution, offrant une analyse détaillée des variations intra-parcellaires. Les drones sont capables de produire des images, y compris lors de couvertures nuageuses, mais peuvent être contraints par les fortes rafales. Des start-ups comme Exo.expert mutualisent le travail grâce à l’organisation de tournées optimisées de pilotes de drones sur un territoire et sur plusieurs types de cultures. La réduction du délai de remise des cartes de préconisation aux agriculteurs constitue un des arguments de vente de ce service.
Plante virtuelle
Les modèles de pilotage dynamique de la fertilisation azotée, tels que Ferti Adapt CHN d’Arvalis lancé en 2025, visent à simuler les stocks et flux d’azote au sein des parcelles de façon prédictive en intégrant la phénologie et la physiologie des plantes, ainsi que des facteurs environnementaux comme l’offre en eau et la minéralisation du sol. Bien que ces modèles ne puissent pas prendre en compte tous les aléas (maladies, stress thermiques, excès d’eau), ils sont capables de fournir des préconisations en temps réel, via la modélisation d’une plante virtuelle, apportant une plus grande réactivité dans le conseil. La force mise en avant pour ce type de modèle est de pouvoir piloter l’ensemble des apports et pas seulement le dernier.
La proxy-détection par drone offre de pouvoir moduler les apports d’azote et de délivrer une rapidité de préconisation. (A. DUFUMIER)
L’observation terrain est encore au cœur de nombreux OAD. (A. DUFUMIER)